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Dominion Corset

Au cœur du quartier Saint-Roch, l'édifice de l'usine Dominion Corset témoigne de l'histoire manufacturière de la ville. Les corsets et dessous féminins sortis de ses ateliers ont fait la renommée de l'entreprise pendant plus de 100 ans.

La plus belle manufacture du continent

Georges Élie Amyot et Léon Dyonnet s'associent dans la manufacture D. & A. Corset en 1886. La société est dissoute en 1888 et Amyot décide de continuer seul sous le nom de Dominion Corset Manufacturing Company. Il va de succès en succès, ouvrant une succursale à Montréal en 1889, puis à Toronto en 1892.

En 1897, il achète l'ancienne manufacture de chaussures de Guillaume Bresse et Cie, qu'il restaure pour y installer son entreprise. Agrandi en 1909, l'édifice est dévasté par un incendie en mai 1911. Sans interrompre la fabrication, qu'il poursuit à quatre endroits différents, Amyot entreprend sur cet emplacement la construction d'un nouvel immeuble, plus vaste, d'après les plans de l'architecte Georges-Émile Tanguay. Inaugurée en décembre de la même année, la manufacture est considérée comme « l'une des plus belles du pays et même du continent ».

Une histoire de famille

L'entreprise poursuit son ascension remarquable. Son chiffre d'affaires atteint un million de dollars en 1914. Il grimpe à 2,5 millions en 1920, lorsque Louis-Joseph Adjutor Amyot succède à son père à la direction. La compagnie, qui compte plus de 1 000 employés, est cotée en bourse au début des années 1950. Pierre Amyot, fils d'Adjutor, devient président en 1965. La compagnie, qui augmente sans cesse sa production, ouvre une autre manufacture à Matane en 1968.

Une main-d'œuvre féminine

À la production, la main-d'œuvre est exclusivement féminine. Les ouvrières sont supervisées par des contremaîtresses en lien avec la direction. Même si le travail en usine n'a pas très bonne réputation dans les années 1920, il permet aux femmes célibataires de subvenir à leurs besoins en dehors du mariage et de la vie religieuse. Jusqu'à la fin des années 1950, il est interdit aux femmes mariées de demeurer à l'emploi de la compagnie.

L'évolution des dessous féminins

À l'affût des tendances nouvelles, la compagnie adapte sans cesse les dessous féminins. Les corsets fabriqués à la fin du 19e siècle donnent une taille de guêpe à celles qui les portent au moyen de « tournures » en forme de cerceaux s'adaptant aux robes de l'époque. Au début du 20e siècle, la baleine antirouille affine les silhouettes sans trop contraindre la respiration. De nouveaux corsets et bustiers réduisent les rondeurs indésirables de la mode tubulaire des années 1920. Une nouvelle coupe découvre le dos des élégantes au début des années 1930. L'arrivée des tissus synthétiques fait disparaître les baleines métalliques après la Seconde Guerre mondiale. La clientèle adopte les premiers modèles de gaines et de soutiens-gorge. Les années 1950 constituent l'âge d'or de la compagnie, qui lance les lignes Sarong et Daisyfresh.

La fin d'une époque

Au départ de Pierre Amyot en 1973, la direction de l'entreprise est confiée à Maurice Godbout. La compagnie, achetée en 1977, adopte une nouvelle stratégie de marché et prend le nom de Créations Daisyfresh. Elle est encore vendue en 1988 à la compagnie Canadelle WonderBra, qui abandonne la manufacture de la basse ville pour s'établir dans le parc industriel de Vanier. Pendant un siècle, l'usine Dominion Corset a marqué l'histoire des femmes à Québec.

La manufacture désaffectée est finalement réaménagée pour abriter le Centre de développement économique et urbain (CDÉU) de la ville de Québec et l'École des arts visuels de l'Université Laval. L'arrivée des fonctionnaires et des étudiants au début des années 1990 contribue à la revitalisation du quartier Saint-Roch.

Source

Du Berger, Jean et Jacques Mathieu (dir.), Les ouvrières de Dominion Corset à Québec, 1886-1988. PUL, 1993.